Compte rendu d'audience : La prison comme garde-fou
Un retraité de chez Yves-Saint-Laurent a été condamné pour violences conjugales… à sa demande.
Un prévenu souhaitant rester en détention. Un procureur se refusant à requérir une peine. Un avocat de la défense avouant son incapacité à plaider. L’affaire Fassola relève de la « situation ubuesque ».
Jugé mardi au tribunal de Bobigny (Seine saint Denis), le retraité est accusé d’avoir frappé sa femme, au visage, à la tête, et dans les côtes. De l’avoir menacée de mort.
En trench léopard et bottines en moumoutte, elle oblige la présidente à parler fort pour l’entendre. Parle fort pour s’entendre elle-même. « Au début, cet homme était très bien. Mais il est devenu fou. Maintenant, j’ai peur chez moi ».
Psychologiquement instable, M. Fassola ne conteste pas les faits, il exprime ses regrets. Voix étouffée, gestes hésitants, yeux constamment baissés, il transpire la nervosité. Déglutit. « Je prends un médicament qui me fait avoir des réactions bizarres. Je suis violent par moment. »
Casier vierge, longue carrière chez Yves-Saint-Laurent, le procureur rappelle combien une telle altération de sa personnalité était imprévisible. Combien la situation est inédite. « C’est l’histoire d’une dispute qui dégénère. M. Fassola a des problèmes psychologiques lourds, il n’a pas sa place en détention. Je n’ai pas de solution miracle. »
L’avocat de la défense en propose une : éloigner le prévenu de sa femme. « Il faut en finir. La cohabitation est devenue insupportable, mon client a besoin d’être arraché physiquement à son épouse. »
En pleurs, M. Fassola demande à parler à sa femme. Il parvient malgré les injonctions du tribunal à lui souhaiter un bon anniversaire, reçoit en retour des souhaits de bon rétablissement. Avant de partir quatre mois en prison. Pour eux, quatre mois de séparation.